Entretien avec Lenio Kaklea
Discussion avec l’équipe de Montpellier Danse à son arrivée en résidence à l’Agora, cité internationale de la danse, le 25 février 2025, pour la création de son nouveau spectacle Les Oiseaux.
Quel est le sujet de ce nouveau spectacle ?
La pièce s’appelle Les Oiseaux. Sans aucune ambiguïté. La pièce porte vraiment sur la figure des oiseaux. Plus largement, c’est une pièce sur la question des frontières : en regardant les oiseaux voyager, migrer, être ensemble, être en unisson, en dissonance, qu’est-ce que cela nous apprend sur nous, les humains ? Comment fait-on pour être ensemble ? Quel type de parcours faisons-nous ? Quelles frontières traverse-t-on ? Comment est-ce qu’on s’organise pour être ensemble ? Comment cela peut-il marcher ou non ? C’est une pièce sur la société.
Vos pièces sont souvent hybrides, est-ce à nouveau le cas pour cette création ?
Dans mon travail, et encore plus dans Les Oiseaux, je crée des pièces plutôt hybrides. Je travaille avec beaucoup de matières autres que la danse. La chorégraphie est souvent complexe, avec beaucoup de gestes, assez intenses, rapides. Mais il y a aussi d’autres éléments. Dans Les Oiseaux, il y aura par exemple un trapèze qui sera investi par Dimitri Mytilianios et Nefeli Asteriou. On travaille aussi sur l’image projetée en live par un drone qui sera conduit par Louis Nam Le Van Ho. Le choix de la présence d’un drone, c’est non seulement parce que c’est un outil de surveillance, mais aussi car c’est un espèce d’oiseau mécanique… Donc, on est sur un spectacle qui n’est pas que de la danse. C’est un spectacle mixte, dont la danse est évidemment la matière motrice.
Vous démarrez le travail sur la danse, mais vous semblez très avancée dans votre réflexion et dans la conception du spectacle.
C’est notre première résidence avec les danseurs, mais on sait déjà à 90% à quoi ressemblera le décor qui vient d’être finalisé avec la scénographe. Clio Boboti travaille sur l’idée d’un ciel en mouvement, plutôt abstrait. La musique est en cours. On a initié une discussion avec l’ex-directeur du laboratoire de la bioacoustique du CNRS, Thierry Aubin, qui est une incroyable figure qui étudie les oiseaux et notamment le langage des oiseaux. Car les oiseaux communiquent leurs émotions, ils ne font pas que s’alarmer d’un danger. Ils se présentent, sont en colère ou contents, ils ont des arbres qui leur appartiennent… Il y a tout un monde qui communique. Thierry Aubin étudie ça et nous fait l’honneur de pouvoir accéder aux données des bioacousticiens et de travailler avec des enregistrements pris sur le terrain, dans des colonies d’oiseaux. Ces enregistrements sonores nous permettent d’accéder au monde sonore des oiseaux. Pour ce qui est des costumes, ils sont presque prêts. Avec Olivier Mulin, on s’est inspiré d’une collection iconique d’Alexander McQueen sur les oiseaux, c’est très beau, très punk ! Olivier travaille quasi exclusivement à partir de son vestiaire. On recycle d’anciennes pièces. Écologiquement et esthétiquement, c’est extraordinaire.